Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Une enfance années 50-60

Archives
Publicité
Newsletter
Derniers commentaires
Visiteurs
Depuis la création 35 419
4 avril 2015

Mon blog-feuilleton sur le Ballet de l'Opéra au 19ème siècle

Rien à voir avec Enfance lointaine (que je reprendrai un jour, promis !),

mais j'ai ouvert un nouveau "blog-feuilleton" sur le Ballet de l'Opéra au 19ème siècle :

En 1866 commence une correspondance imaginaire entre un fils et son père, ayant pour commune passion le ballet. La première lettre de Charles à son père Emilien date de 1866, alors que l'Opéra se prépare à créer un nouveau ballet intitulé La Source.

Au fils de ses lettres, Charles partagera ses enthousiasmes de tout jeune abonné à l’Opéra avec son père, désormais assigné en province pour raisons de santé. Le père a connu les fameux débuts de la Taglioni dans la Sylphide, a vu l’inoubliable Cachucha de Fanny Elssler dans le Diable boiteux, a applaudi Carlotta Grisi dans Giselle, et se plait à partager ses souvenirs avec son fils. Le jeune Charles lui racontera de son côté chaque création d'un nouveau ballet, lui rapportera les anecdotes qui circulent au foyer de la danse et sera dans la salle le 5 janvier 1875 lors de l’inauguration solennelle de l’Opéra Garnier.

A suivre...

http://balletopera19eme.canalblog.com/

 

Publicité
Publicité
19 décembre 2013

Par la faute d'une armoire blanche

C'était une haute armoire blanche, dans la cuisine. Elle paraissait immense à mes sept ans et je me demandais toujours quels trésors elle pouvait bien receler tout là-haut, là où Maman elle-même ne pouvait accéder qu'avec un escabeau. Un jour du mois de décembre, je me trouvai seule à la maison, Maman partie au marché. Vite, je m'emparai du lourd escabeau, le traînant difficilement devant l'armoire et le dépliant avec effort. Je grimpai les marches et arrivai tout en haut perchée, les yeux à même d'explorer les mystères de l'armoire blanche. Mon attention fut immédiatement captée par des livres et des jouets qui ne pouvaient être destinés qu'à l'unique enfant de la maison : moi. Parmi les livres, je repérai Les Petites filles modèles et aucun doute ne fut plus permis : le père Noël, à qui j'avais commandé cet ouvrage n'existait pas ! Le vieux bonhomme n'était autre que les parents, qui entreposaient les cadeaux tant convoités tout en haut de cette énigmatique armoire blanche ! J'enregistrai cette évidence sans trop de déception, car une tâche urgente m'attendait : commencer derechef à lire les aventures des Petites filles modèles, perchée là-haut sur mon escabeau. Ah comme cette lecture et son goût d'effraction me parurent délectables !

Le grand soir venu, je fis comme si de rien n'était, attendant juste un peu plus sagement que d'habitude que résonne la clochette annonçant le passage du Père Noël. Prudente, je tus ma découverte, me demandant si, l'an d'après mes parents m'offriraient encore des cadeaux alors que je ne croyais plus au mythe soigneusement entretenu.

13 décembre 2013

Calendrier de l'Avent

Chaque année, j'avais droit à mon calendrier de l'Avent. Maman me le donnait quelques jours avant le premier décembre et chaque soir je le contemplais avec ravissement. C'était invariablement un village sous la neige, à l'heure où le ciel tire sur le bleu marine, avec ses boutiques, son église, ses lanternes entourées de halos jaunes, ses enfants encapuchonnés faisant des glissades ou un bonhomme de neige, un grand sapin dressé bien en vue et illuminé de bougies, des façades aux volets clos, qui donnaient envie de savoir ce qui se cachait derrière. Le tout était saupoudré de givre argenté, que je frôlais du bout des doigts pour recueillir avec dévotion une once de magie.

En attendant le premier décembre au matin, j'examinais mon calendrier sous toutes les coutures, repérant une à une les vingt-quatre fenêtres habilement cachées, brûlant d'en ouvrir au moins une, juste une. J'aurais aimé y trouver tout de suite un lutin au bonnet rouge ou même une simple bougie brillant de tout son feu. Jusqu'au premier décembre, difficilement, je patientais. Venait enfin le grand jour de la première fenêtre à ouvrir. Hop ! Dès le saut du lit je n'avais qu'une hâte, celle de découvrir enfin l'image qui m’attendait ! Quelle qu'elle fût, j'étais ravie : Noël annonçait officiellement sa venue. Par la suite, j'étais moins patiente : chaque soir je contemplais mon calendrier, grillant d'envie d'ouvrir prématurément une fenêtre ou deux, de préférence les plus petites et les mieux dissimulées. Souvent, je cédais à la tentation, ouvrant la fenêtre le moins possible, juste pour entrapercevoir une fugitive image, puis je refermais le petit volet avec application, tentant de dissimuler son effraction précoce.

Une seule fenêtre échappait à ma curiosité et restait close jusqu'au 24 décembre : la dernière. Point par respect de la date fatidique, juste parce je savais à l'avance ce qui se cacherait derrière - une scène de la Nativité - et aussi parce qu'étant la plus grande, elle était aussi la moins amusante à chercher.

 

 

12 octobre 2013

La colonie de l'abbé Soudry (2)

Cette colonie dirigée par notre cher abbé Soudry réunissait toutes les conditions pour que huit fillettes y coulent des jours heureux. Dans ma caboche de neuf ans, il y avait cependant un point qui laissait à désirer : l'hygiène. Notre "salle de toilette" était installée dans un appentis et consistait en une grande table où étaient posées huit cuvettes que nous remplissions chacune à notre tour à la pompe de la cour, car il n'y avait pas d'eau courante dans la colonie.

Fort bien, me disais-je, mais comment se laver intégralement en compagnie de sept autres fillettes et d'une monitrice qui surveillait les opérations ? Nous prenions des bains fréquents dans la Loire, mais une hygiène quotidienne plus poussée me paraissait toutefois nécessaire. Tranquillement, j'allai faire part de ce problème à l'abbé Soudry :

- Monsieur l'Abbé, il y a quelque chose qui me tracasse, mais j'ai eu une idée.

- Quoi donc, mon enfant ? Quelque chose ne va pas dans la colonie ?

- Voilà, c'est ça, c'est pour la toilette.

- Tu n'es pas habituée à te laver à l'eau froide, c'est ça ?

- Non, ça ne me dérange pas du tout. Par contre, vous comprenez, on ne peut pas vraiment se laver entièrement quand on est huit filles dans la même pièce. Alors voilà mon idée : il y a une petite pièce à côté de la nôtre. Il suffirait de la débarrasser de tout ce qu'il y a dedans et de mettre un rideau séparant les deux endroits. Chacune notre tour nous pourrions passer derrière le rideau avec notre cuvette et bien nous laver.

- Mais quelle bonne idée tu as eue ! Bien sûr, nous allons faire ça ! Cette après-midi après la sieste nous allons tous nous mettre à débarrasser cette petite pièce et pendant ce temps, Madame Robert* trouvera bien de quoi confectionner un rideau. Dès demain, vous aurez votre salle d'eau privée. Vraiment je te remercie de ton idée !

*Madame Robert était la directrice de la colonie. 

 

 

9 octobre 2013

La colonie de l'abbé Soudry

Mon père était strict sur ce point : fille unique, je devais me frotter à la collectivité et partir tous les ans pour un mois en colonie de vacances. Aussi ouvris-je grand l'oreille lorsque notre cher abbé Soudry, qui nous faisait le catéchisme avec tant de talent et de bienveillance, nous fit part d'un projet de colonie pour l'été suivant. Enthousiaste j'arrivai comme un ouragan à la maison, disant que je voulais aller en colonie avec notre abbé. Mes parents n'y virent aucune objection et je partis, enchantée, avec quelques camarades "de cathé".

C'était en vérité une toute petite colonie, nous étions seulement huit fillettes, pour cinq adultes : l'abbé, la directrice et trois monitrices. Nous étions installées dans de vieux bâtiments de ferme, dans un coin perdu de la Nièvre. Nous, les huit filles, dormions toutes ensemble dans un dortoir et, matin et soir, nous nous en donnions à cœur joie, sautant sur nos lits en chantant à tue-tête les chansons à la mode de cet été-là, ou encore éteignant les lumières tandis que l'une de nous prenait sa voix la plus caverneuse pour crier : "Minuit, l'heure du crime !" tandis que les autres feignaient l'effroi en s'enterrant la tête au fond des draps.

Indulgence était le maître-mot de cette colonie, et nous avions plus l'impression de vivre notre vie, avec des adultes juste pour nous épauler, que de subir des contraintes. Une fois les corvées effectuées (lits, ménage, vaisselle, épluchure des légumes...), les journées s'organisaient un peu selon notre bon plaisir, avec de fréquentes baignades dans la Loire, à 20 minutes de marche. Indulgent, notre cher abbé l'était particulièrement à notre égard. Nous l'aimions tant que nous avions pris l'habitude, sans que rien ne nous fût demandé, d'assister chaque matin à la messe qu'il donnait et même de communier tous les jours. Or, en ce temps-là, il fallait être à jeun pour communier, seules les boissons étaient autorisées. Nous boudions donc scrupuleusement les tartines du petit déjeuner. L'abbé Soudry ne l'entendait pas de cette oreille et nous dit plusieurs fois que communier le dimanche suffisait amplement. Mais non, nous voulions aller à la messe et communier tous les jours !

Un matin, sur la table du petit déjeuner, nous trouvâmes, interloquées, d'énormes bols d'épaisse bouillie au chocolat devant chacune de nos places. Nous n'osions pas y toucher ! L'abbé survint alors et nous dit : "Alors les enfants, vous n'aimez pas la bouillie au chocolat ?" Si, bien sûr, nous l'aimions, mais elle ne nous paraissait pas compter comme une simple boisson. "Allons, dit l'abbé, vous voyez bien qu'il n'y a pas de cuillers ! Si vous avalez la bouillie en la buvant, celles qui le veulent pourront communier !"

Publicité
Publicité
4 octobre 2013

Opéra

Je faisais de la danse depuis deux ans déjà. Ayant abandonné la tunique de satin jaune de ma première année, je portais désormais un strict justaucorps noir et des chaussons noirs eux-aussi, demi-pointes et pointes, car j'étais passée au classique. Je travaillais la danse avec plaisir, mais il n'y avait là pas de magie particulière - si ce n'était celle de la musique - l'univers de la danse enfantine n'étant à l'époque pas encore peint en rose bonbon. Sur ces entrefaites mes parents décidèrent qu'il était temps de me conduire à l'Opéra voir un ballet. Je ne savais pas du tout à quoi m'attendre, l'homonymie entre les mots "ballet" et "balai" ne me paraissant pas très encourageante. Un soir, donc, nous partîmes en famille pour l'Opéra Garnier. Nous avions des places tout en haut de la salle, "au poulailler" disait Papa, et ce mot non plus n'avait rien de très engageant. Puis le rideau s'ouvrit sur le défilé du corps de ballet.

Muette, les bras crispés sur les accoudoirs, je fus instantanément subjuguée. Au son d’une musique solennelle, des rangées entières de petites filles de mon âge avançaient en tutus mousseux, saluaient dignement puis disparaissaient, bientôt remplacées par des danseuses adultes en tutus plus épanouis, en rangs sans cesse renouvelés, qui se ployaient en un ensemble parfait lorsqu’elles arrivaient au bord de la scène. Vinrent alors des danseuses isolées, brillant de mille feux, parées d’un diadème, accourant sous des applaudissements nourris et plongeant chacune à leur tour dans une sublime révérence. Vinrent encore, à ma stupéfaction, des rangées d’hommes habillés en noir et blanc, puis des danseurs isolés, qui eux-aussi accouraient vers un public qui les ovationnait. Comme les danseurs, la musique se déployait en vagues renouvelées, donnant toute sa splendeur à cette cérémonie qui semblait ne jamais devoir finir.

Puis soudain, danseurs, danseuses et petits rats se déplacèrent comme les pièces éparpillées d’un kaléidoscope pour se regrouper dans une superbe pose finale. Les applaudissement crépitaient, tandis que l‘extase me rendait immobile. Jamais, non jamais, je n’avais vécu un moment aussi extraordinaire.

 

3 octobre 2013

Velours

J'étais maintenant en CM2, encore quelques mois et j'entrerais au lycée. Notre institutrice, Mademoiselle Berthier, était sévère et point trop aimable. Avec elle on travaillait dur ! Cependant nous formions un peloton de filles en tête de la classe et nous nous stimulions les unes les autres, parfois au-delà même de ce qui nous était demandé. Ainsi nous étions-nous mis en tête d'avoir une orthographe parfaite... à dix ans, même pas dix ans dans mon cas ! Parfaite, cela voulait dire évidemment zéro faute à toutes les dictées, mais aussi jamais de fautes d'orthographe dans nos rédactions et nos différents cahiers. Le défi nous paraissait à notre portée et était presque toujours relevé. Presque... car je me souviens comme d'une cruelle humiliation du seul jour de CM2 où je fis une faute dans ma dictée. Il s'agissait du mot "velours" et je n'étais pas sûre de son orthographe. J'en étais d'autant plus désolée que "velours" me paraissait un si joli mot, évocateur de robes de fête, de rideaux somptueux, d'Opéra et de théâtre ! Longuement j'hésitais entre mettre un "s" ou non au bout de ce morceau de velours. Avec juste un "r" il m'avait l'air un peu nu, ce n'était pas assez riche pour un tel mot ; aussi me décidai-je pour un "s" final. Longuement, je contemplai ma page, me disant que décidément oui, ce "s" faisait chatoyer plus encore le mot "velours".

Puis juste au dernier moment, comme la maîtresse allait relever mon cahier, je me ravisai et barrai le fameux "s". Immédiatement mon instinct me souffla que j'avais fait une bêtise, mais il était trop tard ! Le soir, en rentrant à la maison, mon premier geste fut d'aller vérifier dans le dictionnaire et je sus que j'avais fait une faute à ma dictée. Le lendemain, je reçus ma note, penaude : 9 sur 10 au lieu de l'habituel 10 sur 10. Je rougis comme une tomate sous l'œil goguenard d'une compagne qui était engagée comme moi dans la course aux zéro fautes. "Je suis sûre que tu t'es trompée sur le mot velours, moi je savais l'écrire ! " chuchota-t-elle avec dans la voix une étincelle de triomphe qui m'aurait bien donné envie de rentrer dans un trou de souris.

11 avril 2013

Molière

Dans notre école de la banlieue parisienne, nous avions une grande chance : chaque année une troupe théâtrale venait se produire sur la grande estrade du préau, transformé pour un jour en salle de spectacle. Un beau matin, en arrivant à l'école, nous apercevions un ou deux camions postés devant la grille et, quitte à arriver en classe après la cloche, nous nous attardions pour apercevoir un bout de la valse des éléments de décor en carton-pâte et des costumes colorés allant rejoindre le préau. Comme ça, par petits morceaux, cela n'avait l'air de rien, mais nous savions que, l'après-midi venue, tout se transformerait comme par magie, nous emportant en d'autres lieux et dans un autre temps.

Il m'était difficile de me concentrer ces matins-là sur une dictée et des problèmes. Comme toutes les autres, j'entendais la rumeur assourdie de coups de marteau et de voix fébriles qui s'entrecroisaient. Je savais que des décors se montaient, que des éclairages se préparaient, que des comédiens prenaient leurs marques. Vite, vite, que l'heure du déjeuner arrive ! Je rentrais chez moi en courant, comme si cela pouvait accélérer le moment du retour en classe! J'avalais mon déjeuner en toute hâte, courais de nouveau sur le chemin de l'école, arrivant bien trop tôt devant les grilles encore closes et les camions désertés.

Enfin, les grilles s'ouvraient ! Enfin les maîtresses nous conduisaient à notre place dans le "théâtre", la scène encore préservée par un grand rideau fermé sur ses mystères. Je m'asseyais le coeur battant, attendant les trois coups rituels qui annonceraient le bienheureux moment. Toc, toc, toc, un personnage vêtu à la mode d'autrefois se faufilait entre les plis du rideau et nous annonçait le titre de la pièce. C'était invariablement une pièce de Molière; je me souviens surtout du Médecin malgré lui et des Fourberies de Scapin. Et voici que le rideau s'ouvrait sur maîtres et valets, médecins et servantes, personnages hauts en couleur qui me séduisaient d'emblée. Et c'en était parti pour deux heures de représentation haletante : tantôt je retenais mon souffle, tantôt je riais à gorge déployée ! Je comprenais la langue de Molière comme si je l'avais toujours parlée. Je buvais la représentation jusqu'à la dernière goutte, puis j'applaudissais à tout rompre, transportée dans un autre monde. Le rideau enfin retombait, c'en était fini pour une année...

 

9 avril 2013

Trousse

Dans mes dernières années d’école primaire, le plumier avait cédé la place à la trousse, qui était alors un grand étui plat, en cuir ou en plastique, qui se dépliait en deux ou trois compartiments.  Les premières élèves qui eurent une trousse étalaient leur bonne fortune sous le nez des autres et leur montraient complaisamment les accessoires rangés en bonne place et maintenus par un élastique : l’équerre, la règle plate, la règle carrée, le compas, le porte-plume et les diverses sortes de plumes nécessaires pour les séances d’écriture.

La trousse ne permettait plus de ranger nos crayons de couleurs. Nous avions donc à part une boîte métallique de crayons de couleur Caran d’Ache. Notre plaisir était de les avoir toujours bien taillés et rangés par ordre de couleur en un arc-en-ciel lumineux. C’était à peu près les seules notes de couleurs vives dans nos fournitures scolaires. De même que nous avions toutes un taille-crayon semblable, simple ou double en métal gris, nous avions la même gomme encre et crayon Mallat, rouge pour la partie crayon, bleue pour la partie encre. Quelques années plus tard allaient apparaître les gommes et les taille-crayons fantaisie, de toutes les formes et de toutes les couleurs… une vraie révolution !

25 mars 2013

Rameaux

J'aimais beaucoup la fête des Rameaux, le dimanche précédant celui de Pâques. Ce dimanche-là, nous n'avions pas comme d'habitude une messe réservée aux enfants, dans notre salle de cathéchisme, mais nous avions droit à la solennité de l'église paroissiale, où nous nous rendions, pour la plupart d'entre nous, en compagnie de nos parents. Moi, en tous cas, j'y allais avec Maman.

A l'entrée de l'église se tenaient des étals chargés de buis bien verts à l'odeur un peu âcre. Maman choisissait avec soin une belle brassée qu'elle répartissait en deux : une pour elle et une pour moi. Et chacun entrait dans l'église muni de ses rameaux odorants. A ce moment-là, ce n'était encore que des végétaux ordinaires, sans différence avec ceux qu'on pouvait couramment voir dans nos jardinets de banlieue. Cependant, au cours de la messe, en étant bénis, nos rameaux de buis allaient prendre un caractère précieux entre tous et acquérir le pouvoir de protéger la maison pendant toute une année.

C'est avec une certaine componction que je reprenais le chemin de chez nous, tenant en main le bouquet miraculeux. Arrivées à la maison, nous dégarnissions les vases de leur buis de l'an passé et les regarnissions avec soin des rameaux tout neufs. Parée de son vase de buis saint, chaque pièce serait bénie et protégée pendant une année ! Je me souviens particulièrement d'un vase mural en céramique blanche, confectionné par ma tante Ada, qui était artiste, accueillant chaque année les rameaux ornant le salon.

Il y avait cependant un problème : la coutume voulait qu'on ne jette pas le vieux buis sec de l'année précédente, mais qu'on le brûle. Généralement, après quelques essais plus ou moins infructueux, Maman et moi nous résignions à répartir les anciens rameaux dans divers lieux un peu cachés du jardin. Ou parfois, même, nous les jetions à la poubelle. J’étais vaguement inquiète : était-ce là un blasphème ?

 

Publicité
Publicité
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 > >>
Publicité